Comment se fait-il que Chimera Sanctuary soit à la peine pour trouver son financement alors que les retours des joueurs sont très positifs ? Pour mieux comprendre et apprécier, mettons de côté l’univers, son verbiage et ses illustrations. On découvre alors un jeu de plis qui mérite qu’on lui porte attention tant il demande réflexion et stratégie sur la base de règles facilement assimilables.
Ne vous y trompez pas, Chimera Sanctuary est un bon petit jeu de plis avec des mécaniques simples et bien dosées. Chaque joueur dispose de 15 cartes plus un paquet de 10 cartes « fortunes » qui sont autant de bonus. Le vainqueur est celui qui obtient le premier 50 points de renommée. A chaque pli gagné, les joueurs additionnent la valeur de renommée des cartes ramassées. Pour remporter un pli, il faut avoir la valeur la plus forte dans la couleur annoncée, sauf quelques règles particulières.
Des règles et des vertus
Ce qui distingue de prime abord Chimera Sanctuary, c’est que chaque carte dispose des quatre couleurs (qui sont plutôt des symboles nommés Croix, Ecu, Epine et Etoile) existantes et prend une valeur différente selon la couleur en jeu.
Elle dispose aussi d’une « vertu », une règle spéciale applicable sous condition. Il y en 3 sortes : les vertus rouges qui ne peuvent se déclencher que si la carte est la première jouée, les vertus jaunes qui ne s’appliquent que si la carte a la valeur la plus faible du pli quand elle est posée et les vertus violettes qui peuvent se jouer à tout moment. Les effets sont variés : ces vertus permettent de tirer une carte « fortune » et d’en appliquer l'effet, de voler un point de renommée à un adversaire, de faire que la valeur la plus faible gagne le pli, etc. Inutile de tout dévoiler ici, l’essentiel est de savoir que cela propose une profondeur stratégique qui fait toute la saveur de Chiméra Sanctuary.
Les contres sont possibles et les retournements de situations nombreux. Il convient de bien évaluer les valeurs de chaque carte dans chacune des 4 couleurs et de combiner cela avec la « vertu » au regard des cartes déjà jouée (ou non car si vous avez gagné le pli précédent, vous choisissez la couleur jouée pour le pli suivant en posant la première carte).
Plier les adversaires pour gagner en renommée
L’autre idée intéressante est le déroulement de la partie avec quelques règles aussi simples que spécifiques qui viennent pimenter le jeu. Chaque joueur choisit sa « harde », c’est-à-dire son paquet de 15 cartes de créatures et les 10 cartes Fortune associées. Il y a pour l’instant 4 hardes disponibles typées « montagne », « forêt », « eau » et « nuit ». Il semble qu’une cinquième pourrait être débloquée en Strech Goal.
Une fois les 15 cartes jouées, il sera possible de changer de paquet de cartes pour recommencer une série de 15 plis jusqu’aux 50 points de renommé nécessaire à désigner le vainqueur. Ces hardes sont asymétriques, les cartes n’ayant pas les mêmes valeurs ni les même vertus. Il serait intéressant de savoir comment Alanih Kerr, l’auteur du jeu, a conçu et réparti les valeurs pour chaque carte afin de différencier la manière de jouer chacune des hardes.
Même les chimères ont du chien !
Pour donner du rythme au jeu, les 15 plis se jouent en 2 phases ; la première avec une main de 8 cartes prises au hasard et la seconde avec les 7 cartes restantes. Au début de chaque main, les joueurs donnent une de leurs cartes à un des adversaires. Au moment où celui-ci la jouera, les effets de la carte bénéficieront au joueur initialement propriétaire, y compris le gain du pli si c’est le cas.
Chaque joueur met aussi de côté une et une seule carte face cachée (comme le chien au tarot), qu’on ne peut lui subtiliser et qui viendra ajouter ses points de renommé une fois toute la main jouée. Cela mis en place, la séquence se déroule simplement et le gagnant de chaque pli voit son score de renommée augmenter (ou parfois diminuer) au fil du jeu.
L’ensemble de ces règles est facile à appliquer et elles se combinent naturellement pour donner une dimension tactique qui fait toute la personnalité de Chimera Sanctuary. Chaque pli ouvre à plusieurs choix pour tenter de l’emporter.
Tellement beau qu’on en oublie que c’est bien.
A cela, s’ajoute un univers et des graphismes remarquables. Alanih Kerr n’a pas lésiné sur les illustrations et a été chercher de talentueux dessinateurs pour donner vie à chaque créature, à chaque carte.
La richesse de cet univers est aussi, malheureusement, le point faible du projet (pas du jeu). L’auteur a en effet choisi de mettre en avant cet univers très particulier, avec ses codes et son langage (pas toujours harmonisé d’ailleurs !) et il communique bien plus sur la forme (le plumage comme dirait Lafontaine, grand spécialiste des bestiaires s’il en est !) que sur l’intelligente mécanique du jeu, son cœur et sa richesse.
La clarté est une vertu ludique.
Si le projet peine à décoller, c’est aussi que la communication, à l’instar de la page Kickstarter, est quelque peu chaotique. Certains éléments d’illustration sont en français au milieu d’une page en anglais, ce qui ajoute à la confusion. On sent la passion et l’implication du porteur du projet mais aussi son manque de recul, son envie de tout dire et parfois d’avoir déjà tout dit depuis 15 ans qu’il porte le projet (l’actuel campagne est d’ailleurs un reboot d’une première tentative de financement en 2015).
Alanih Kerr fait au mieux avec les moyens dont il dispose et cela se voit, positivement et négativement. La campagne gagnerait beaucoup à plus de clarté et de simplicité de présentation des règles, des cartes et du contexte. Il y a encore un gros travail de réécriture à mener pour finaliser le jeu.
Quant au tarif (21€ fdpin pour la France), il est plutôt raisonnable et deviendra vite intéressant dès que les premier Stretch Goals seront débloqués; ce qu’il faut espérer rapidement à présent pour que cette campagne Kickstarter trouve un second souffle.
C’est pourquoi, je le récris ici : ne vous leurrez pas aux chimères graphiques du jeu : celui-ci propose une déclinaison intéressante du jeu de plis et ouvre à des parties aussi sympathiques que tendues. A cela s’ajoute de belles illustrations et un univers riche. C’est bien dans ce sens qu’il faut découvrir Chimera Sanctuary et c’est pour cela que les commentaires élogieux viennent des personnes ayant pu jouer avec le « Print & Play » ou avec le prototype du jeu.
Et pour plus de détails, ou discuter du projet, le forum dédié, c'est par ici.
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