Premier article de @zombie-killer pour cwowd à propos d'un jeu dont on parle peu. A tort, certainement.
Lobotomy est un jeu coopératif pour 1 à 5 joueurs financé via Kickstarter en août 2015.Arrivé il y a quelques mois déjà chez les souscripteurs européens (février/mars 2017), en cours de livraison en Amérique du Nord et disponible en boutique depuis peu.
C'était bien en 2015?
La campagne de financement fut assez classique pour un jeu de figurines. Ni spécialement généreuse, ni franchement avare, l'offre au finale était honnête. Avec un ticket d'entrée à 90$ (85$ en Early Bird) et coûtant 135$ avec son extension, l'offre respectait la gamme de prix de ce genre de jeu. Aujourd’hui, l'offre boutique contenant les Stretch Goals (hors exclusivités Kickstarter) est vendu autour de 90€; ce qui est finalement cohérent par rapport à l'offre de 2015.
La campagne offrait surtout la possibilité pour les souscripteurs d'acheter beaucoup d'add-ons. Dés, monstres, personnages, éléments 3D, dont certains exclusifs, n'étaient certes pas donnés mais, finalement, difficilement trouvables ensuite et constituent un bon moyen de renouveler et de diversifier les parties. Ils ont été une offre non négligeable pour les souscripteurs de l'époque même si, finalement, cela rendait l'investissement financier assez conséquent. Voire extrêmement lourd (10$ la figurine et sa carte, et quelques bundles de 3 types de monstres à plus de 30$).
On pouvait regretter, durant cette campagne, un manque d'offre "gratuite" (beaucoup d'amélioration de matériel, dit box upgrade) de ces monstres supplémentaires, ainsi qu'une extension finalement assez vide pour son prix (proposée à 50$ en achat optionnel, elle est aujourd'hui à 35€ en boutique...).
Alors on a quoi?
Après beaucoup de retard, le jeu est arrivé non sans quelques défauts et qualités notables.
La qualité du matériel et des figurines est plus qu'honnête, la boite est bien pleine et la rejouabilité assez élevée. Avec plus de 20 scénarios -alors qu'on peut en jouer 4 maximum dans une partie en mode difficulté extrême-, le jeu offre quelques belles heures de découverte.
Pour les défauts notés à ce jour, on soulignera des cases un peu petites pour les figurines (un effet de débordement est assez vite constaté quand on joue), des jetons/marqueurs (pour les points de vie, de récupération, d'usure...) assez peu nombreux lorsque l'on joue à plus de 4 joueurs et,surtout, un mode solo qui consiste à jouer avec 3 personnages qui ont beaucoup de cartes et donc difficile à étaler devant soi.
Un autre défaut relevé -mais rapidement corrigé- concerne les règles. Comme beaucoup de jeux de ce type, financés via Kickstarter, les règles et les scénarios de la boîte manquaient de beaucoup de précisions; ce qui rendait le jeu difficilement jouable. Corrigés assez vite, une nouvelle version des règles et des scénarios est désormais téléchargeable et sa clarté règle quasiment toutes les questions d'elle-même.
C'est bien tout ça, mais il est comment le jeu?
Le jeu est déjà très original par son thème. Unique en son genre à ce niveau, il est très immersif grâce au fluff [NDLR : les textes d'ambiance, de mise en situation, historique etc.] et au design des cartes. Tout, dans les moindres détails, est fait pour participer à cet univers; et on appréciera les graphismes et les petites mécaniques qui rendent justice au thème.
En lui-même, c'est un dungeon-crawler où les joueurs vont beaucoup déambuler sur le plateau pour atteindre des objectifs variables en fonction des scénarios. L'ensemble est conçu pour changer d'une partie à l'autre et d'un scénario à l'autre; ainsi, les objectifs sont assez différents et de nouvelles règles viennent modifier le gameplay à chaque scénario.
Il semble toutefois que deux points fondamentaux fassent le cœur de la mécanique : la frustration et l'empressement. Les parties sont des courses contre la montre (matérialisée par le mouvement du Warden, le Boss de fin de niveau qui déambule autour du plateau) où il faut chercher à réaliser les objectifs le plus vite possible. Or, tout est fait pour ralentir les joueurs. Alors, si vous ne supportez pas la frustration, passez votre chemin car c'est vraiment le sentiment qui va vous torturer tout au long de la partie... à vous rendre fou.
Les personnages n'ont en moyenne que 3 points d'action, ce qui suppose une certaine lenteur à se déplacer à travers le plateau. Le plateau lui-même est recouvert d'obstacles (portes, ennemis...) qui vont bloquer vos mouvements, vous contraindre à des tests divers, qui vous font perdre des actions et des tours inutilement. Les monstres (Basique) ne sont d'ailleurs pas si dangereux que cela : ils ne sont là que pour ralentir vos mouvements, vous contraindre à recommencer des combats sans cesse. Gageons que dans une partie difficile, l'usure des combats qui fait perdre quelques points de vie au fur et à mesure doit avoir une autre influence; mais l'essentiel, pour les ennemis est de bloquer des couloirs étroits et vous contraindre à perdre du temps dans les dédales des salles truffées de portes fermées.
Les événements tirés au début du Tour des Monstres, ont eux aussi un effet d'usure. Mais ils sont surtout là pour vous faire reculer dans votre progression ou vous empêcher de progresser. Il n'y a quasiment aucune carte sans événement spécial qui vient gêner les joueurs; par contre, quasiment toutes les cartes font avancer le Warden sur sa piste. Dans une partie à plusieurs scénarios, les nouveaux scénarios apparaissent systématiquement avant que vous ayez fini le premier... ce qui donne l'impression d'essayer d'éteindre des incendies avec de l'essence, d'être débordé par la tâche à accomplir.
En conséquence, le jeu tient surtout à la capacité des joueurs à gérer la pression et à tirer profit de leurs compétences. Un réflexe de joueur de dungeon crawler est souvent de chercher à construire des tanks extrêmement efficaces en combat. Ici, les combats, tant qu'on ne joue pas avec trop de monstres particuliers, Boss ou mini-boss, ne sont pas l'objectif. Les compétences à privilégier sont plutôt celles de furtivité, de mouvement, celles permettant de passer rapidement les tests de crochetage, de fouille... bref, tout ce qui permet aux joueurs d'accélérer leur réussite.
Faut avoir un master de psychologie pour jouer?
On notera qu'avec un livret de 32 pages (sans les scéanrios), Lobotomy possède beaucoup de petites règles : tests d'imagination, de fouille, de crochetage, d'attaque, des effets d'attaques très divers, des actions et des compétences très variées, avec des effets très riches qui souvent ont leurs propres règles... il n'est pas évident de se souvenir de tout et de rendre tout cela fluide.
Pour ne rien arranger, les règles manquent cruellement d'un récapitulatif et d'une organisation ergonomique qui permettent de retrouver rapidement les points de règles ad-hoc. Sans une solide aide de jeu, et une bonne préparation, les joueurs peuvent dès lors passer les premiers tours le nez dans les règles à chercher des réponses à des questions parfois simples. Toutefois, une fois les deux premiers tours passés, le jeu est assez fluide et les tours peuvent aller assez vite... avec ce désagréable sentiment de n'avoir pas fait grand chose pour arriver au bout.
C'est pas en nanglish ce truc?
Avis aux amateurs de bricolage, une VF fan made est disponible.
Cela demande un peu d'impression et de découpage, des protège-cartes et du temps, mais le jeu est finalement entièrement localisé. Ce qui facilite grandement les parties avec ceux qui ne sont pas à l'aise avec l'anglais.
Bon alors je dois en penser quoi?
Lobotomy est un dungeon-crawler unique par son thème et ses références, avec un matériel de qualité, mais exigeant pour les joueurs qui seront soumis à rude épreuve par les règles et la pression du jeu.
Il est agréable par son adaptation automatique au nombre de joueur, son renouvellement constant, et peut avoir un côté mini-campagne quand on joue 4 scénarios d'affilé. Mais, dans ce cas, il faut beaucoup de temps devant soi et des joueurs prêts à supporter la pire adversité.
Le jeu est un coopératif avec en face une bonne résistance dû au fait qu'il est pensé pour empêcher le travail des joueurs. Moralité, préparez le Tranxene ou ce sera la camisole...
Zombie Killer
Et c’est pas d’la sleeve à 4 sous
Froh Le Mage Blanc
Ca va, les cartes sont sleevées sur la photo.